Toujours un visage de femmes soldera mes dettes.
Édouard J. Maunick
Grand-mère Tida avait une tombe
Grand-mère Tida avait une maison
elle préférait la tombe à la maison
elle nourrissait la tombe de fleurs-soleils
elle s’arrangeait pour que la maison marche vers la tombe
la tombe était alors un jardin de lumières
Grand-mère Tida avait un cercueil
Grand-mère Tida avait un lit
elle préférait le cercueil au lit
elle parfumait tous les soirs le cercueil d’encens
elle s’arrangeait pour que le lit soit au-dessous du cercueil
le cercueil pouvait alors parler aux étoiles
Grand-mère Tida avait une robe blanche
Grand-mère Tida aimait sa robe blanche
c’était une robe de noces à volants
Grand-mère Tida ne l’avait jamais portée cette robe
Grand-mère Tida attendait seule la mort
elle chantait en lorgnant des yeux sa robe :
quand la paix règnera au ciel
nous y serons
Rodney Saint-Éloi, « Grand-mère Tida », Récitatif au pays des ombres, Mémoire d’encrier, Montréal, 2011.